Paroles d’expert/e : Entretien avec Clémence Deléage, fonctionnaire internationale française à La Haye

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Clémence Deléage, juriste au sein de l’Organisation pour l’Interdiction des Armes Chimiques (OIAC).

Quel a été votre parcours avant ce poste ? Avez-vous été JEA/VNU dans une/votre OI ?

L’ouverture à l’international et aux relations multilatérales ont été des éléments dominants de mes études. Mon parcours universitaire comprend cinq années d’études de droit, incluant entre autres, un semestre Erasmus à l’Université de Saragosse (Espagne), un LL.M. (Master of Laws) en droit européen à l’Université de Cardiff (Pays de Galles) et un Master spécialisé en droit des organisations internationales (OI) à l’Université Paris II Panthéon Assas.
Grâce à ces expériences diverses, j’ai pu intégrer en stage une organisation européenne basée à Bruxelles (l’Organisation pour la sécurité de la navigation aérienne) et j’y ai construit une première expérience professionnelle pendant deux ans et demi. Afin de varier mon parcours, j’ai choisi de saisir une opportunité dans une autre OI européenne à Bruxelles (le Secrétariat de la Charte de l’Énergie) que j’ai quitté au bout de huit mois pour mon poste actuel. Pendant ces trois années et demie passées à Bruxelles, j’ai suivi de manière proactive les développements et travaux de la DFI et je me suis régulièrement tenue informée des opportunités et programmes proposés. J’ai également intensifié mon réseautage et j’ai pris le temps d’entrer en contact avec une variété d’agents et fonctionnaires travaillant en OI, afin d’obtenir leurs conseils et expériences sur leurs fonctions et activités.
J’ai ensuite postulé en février 2018 pour un poste de Jeune Experte Associée (JEA) au sein de l’Organisation pour l’interdiction des armes Chimiques (OIAC) en tant que juriste associée au sein du service juridique. Cette expérience particulièrement formatrice m’a permis de généraliser mon profil de juriste au sein d’une OI et de toucher à une variété de questions et dossiers liés au droit international public, droit administratif, droit contractuel, la diplomatie et les relations internationales. Après trois années en tant que JEA, j’ai pu saisir en novembre 2021 une opportunité en interne afin d’être renouvelée pour une quatrième année dans mon poste.

Poursuivre une carrière à l’international, notamment au sein d’une OI, requiert de l’exigence, de la détermination et beaucoup de préparation.

Quel est l’aspect de votre travail / la mission qui vous passionne le plus ?

L’OIAC est une organisation reliée au système des Nations Unies et comprend 193 États Membres. L’Organisation est assistée par un secrétariat comprenant environ 500 fonctionnaires internationaux. En son sein, le service juridique dont je fais partie intègre une dizaine de juristes et avocats.
Deux aspects de mon travail me passionnent particulièrement. Le premier est la diversité des tâches qui me sont confiées. La taille du service juridique permet à chaque agent de travailler sur une multitude de dossiers ce qui rend notre travail stimulant et intéressant. Par exemple, une journée peux comprendre la révision d’une note verbale émanent du Directeur général à l’attention d’une Représentation Permanente d’un État Partie, la négociation d’un accord sur les privilèges et immunités, la rédaction d’un dossier juridique auprès du Tribunal Administratif de l’Organisation Internationale du travail dans le cadre d’un litige entre un fonctionnaire et l’Organisation, ou encore, la préparation avec le service des opérations d’un déploiement sur le terrain etc.
Le deuxième aspect de mon travail qui m’enthousiasme est l’impact et la pertinence des missions de l’OIAC dans le contexte international. L’élimination et la vérification de la destruction des stocks et unités de productions d’armes chimiques reste un enjeu majeur pour notre société. L’impact de notre action en Syrie démontre notamment toute l’importance de la nécessité de l’action internationale et de la coopération entre les États Parties à la Convention. La situation en Ukraine et les allégations présumées d’armes chimiques sont également un sujet actuel de la plus haute importance pour notre organisation.

A vos yeux, quelles sont les qualités les plus importantes pour travailler en OI ?

Vouloir poursuivre une carrière à l’international, notamment au sein d’une OI, requiert de l’exigence, de la détermination, et beaucoup de préparation/travail. En plus d’une expérience universitaire solide (connaissances de langues étrangères, masters spécialisés dans des universitaires européennes ou internationales, premières expériences professionnelles pertinentes, etc.), la poursuite d’une carrière en tant que fonctionnaire international/e demande de passer des concours, pouvant s’étaler sur plusieurs mois, parfois sans obtenir de réponse à la fin du processus. Le recrutement y est strict et difficile et la durée de contrats à la clé parfois précaire. Je conseille d’être à la fois patient mais aussi très organisé afin de rester à l’affut des opportunités et vacances de postes.
Tout candidat à ce type de carrière doit également pouvoir montrer des qualités d’ouverture d’esprit et d’adaptabilité afin de pouvoir s’intégrer facilement dans un milieu multiculturel et divers.
Enfin, soyez passionné/es ! Ceci est souvent la clé du succès (et pas seulement dans le monde des OI).