Stratégie Australienne pour le secteur spatial civil 2019-2028
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20 mai 2019
Début Avril, l’agence spatiale australienne a publié sa stratégie de développement concernant les applications civiles. Conscient de sa forte dépendance des ressources étrangères, le secteur spatial Australien devra dans un premier temps s’ouvrir aux collaborations internationales pour ensuite être moteur d’innovation et disposer d’une souveraineté nationale forte sur le domaine.
Rédigé conjointement avec le gouvernement Australien, ce rapport fait état d’une vision : « une industrie spatiale moteur de l’économie, qui inspire et améliore la vie des Australiens ». Pour cela, cette vision s’accompagne d’un plan en 3 étapes (2018, 2019-2021, 2021-2028) et d’un objectif pour 2030 : tripler la taille du secteur spatial jusqu’à hauteur de $12 milliards et créer 20 000 emplois supplémentaires.
1. Vision et axes prioritaires
Vision :
L’Australie articule son plan stratégique autour de 4 piliers :
- L’international, ouvrir ses portes aux agences étrangères tant que cela est cohérent avec les intérêts nationaux.
- Au niveau national, transformer et faire croître le secteur spatial australien, dans des domaines où il présente un avantage compétitif.
- Responsabiliser le secteur spatial à travers l’adoption d’un cadre légal (régulation, risque et pratique spatiale).
- Inspirer les générations de demain (industriels, gouvernement et société civile) afin qu’elles aient à cœur la poursuite et le développement du secteur spatial.
Domaines et axes prioritaires à trois échéances :
Le plan stratégique se construit donc en 3 étapes (2018, 2019-2021, 2021-2028), dont les domaines prioritaires de recherches et les axes de développement sont explicités ici :
- Focus 2018 :
Deux domaines prioritaires ont reçu respectivement $224.9m et $36.9m de la part de Geocience Australia et du CSIRO :- Position, navigation et synchronisation - indispensable à l’agriculture et au secteur minier, mais aussi si l’Australie souhaite se doter de son propre système de navigation satellitaire.
- Observation de la Terre - domaine où l’Australie est leader, à fort potentiel en matière de retombées économiques. Les investissements et les orientations sont définies à travers l’initiative « Digital Earth Australia » de Geoscience Australia. Les domaines concernés sont entre autres : surveillance agricole, surveillances des voies de navigation, gestion de l’eau.
- Focus 2019-2021 :
- Technologies de communications - échange de données par émissions laser, technologies de cryptage quantique, technologies hybrides radio-optiques. Ces technologies émergentes seront critiques pour les communications au sol, maritimes et aériennes.
- Infrastructure au sol - i.e. centre de contrôle de mission à Adélaïde.
- Mise en place d’un cadre de gestion des risques pour l’activité spatiale : poursuite du Space (Launch and Return) Act 2018.
- Focus 2021-2028 :
- Un bond en avant de la R&D - actuellement, les publications de R&D spatiale australienne contribuent à 6.8% des publications mondiales du secteur mais de nouveaux domaines de R&D, pertinents avec les intérêts économiques devront être mis en avant : technologies missilières, matériaux de pointe, médecine spatiale, biologie synthétique, communications quantiques, maintenance en orbite et communications optiques sans-fil.
- Reconnaissance de la situation dans l’espace (SSA – space situation awareness) - suivi des débris spatiaux et gestion du trafic spatial.
- Robotique et automatisation sur terre comme en orbite - L’Australie est leader en ce qui concerne la gestion et le contrôle à distance d’infrastructures. L’ASA souhaite mettre à profit ce point fort en l’appliquant au domaine spatial.
- Accès à l’espace- opportunités commerciales et missions internationales.
2. Stratégies pour la mise en œuvre du plan en trois parties
Afin de mener à bien le développement des axes de recherches explicités plus haut, le rapport élabore une série de recommandations que l’agence spatiale devra mettre en œuvre.
- L’accent est mis sur les missions conjointes avec des partenaires internationaux multilatéraux. Cela passe par la signature d’accords de coopération entre les agences étrangères (NASA, ESA, DLR, JAXA, NZ, Région Indo Pacifique) et les états et territoires australiens, mais aussi la signature d’accords avec des partenaires industriels.
- L’industrie australienne émergente gagnera à concentrer ses efforts dans des domaines où elle fait preuve d’un avantage compétitif :
- Techniques avancées de communication,
- Technologies quantiques,
- Système de propulsions de fusées,
- Médecine spatiale,
- Astronomie.
- Enfin, à long termes, le but de l’Australie est d’affirmer sa souveraineté sur les activités et les infrastructures spatiales.
3. Atouts australiens et défis
Les atouts :
Par les effets combinés du développement rapide de nouvelles technologies et de la forte baisse des coûts, le domaine spatial n’est plus une prérogative uniquement étatique et de nombreux acteurs industriels sont attirés par les opportunités économiques. Outre une situation géographique avantageuse notamment pour les domaines des communications spatiales, de gestion du trafic spatial ou du pilotage/contrôle à distance, l’ASA est au fait de ses forces et faiblesses et énumère ce qu’elle considère comme les avantages du secteur spatial australien :
- Un secteur émergent qui affiche 10% de croissances sur les cinq dernières années et des prévisions qui font état de 7% de croissance pour les cinq années à venir. D’où un intérêt pour leurs partenaires internationaux à se positionner en Australie.
- L’Australie produit 4% du volume des publications scientifiques mondiales, pour seulement 0.3% de la population globale. Le pays bénéficie donc d’une solide réputation en matière de R&D.
- Le gouvernement Australien se veut très proactif lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre des mesures afin d’attirer les capitaux étrangers. Parmi ces mesures, on retrouve l’initiative d’investissements spatiaux à l’international « the International Space Investment initiative » ainsi que « Austrade ».
- De plus il souhaite faciliter les activités annexes du secteur spatial comme le support juridique, le marketing, la finance, et les activités techniques et réglementaires.
- L’Australie souhaite développer rapidement ses capacités d’analyse de données pour les technologies et services spatiaux, domaines davantage compétitifs, première étape de crédibilisation du secteur spatial (mais dont les capacités nationales restent néanmoins à construire).
Les défis à relever :
- Tout d’abord des canaux de formations devront être mis en place en parallèle de la montée en puissance d’une industrie spatiale, afin de développer les compétences nécessaires pour la future main-d’œuvre.
- Les compétences et les savoirs des technologies émergentes comme l’IA, la cyber sécurité et la communication optique évoluent rapidement. L’Australie devra
- se maintenir au niveau dans une féroce compétition mondiale,
- assurer la protection de ces intérêts nationaux.
- L’absence d’une industrie aérospatiale préexistante devra être compensée par le développement de startups et par l’attrait de partenaires étrangers.
- Elle devra aussi faire face à la frilosité des investisseurs dans des technologies émergentes ainsi qu’à l’absence de certains maillons industriels.
- Les chaines de production devront être mises aux normes afin que l’Australie se dote des standards internationaux en matière de certifications techniques et de qualité.
- L’efficacité de la mise en place de ces mesures dépendra donc d’une bonne coordination nationale afin de faciliter la participation d’industriels et de chercheurs étrangers.
4. Leviers et financements
Le rôle du Gouvernement :
- Le gouvernement fédéral se veut partenaire, facilitateur mais aussi régulateur du développement de l’industrie spatiale.
- En matière d’investissements il devra d’une part s’aligner sur la stratégie de l’ASA, mais aussi apporter son analyse au sujet des embûches et des lacunes à prévoir sur le marché.
- Différents leviers d’investissements sont possibles :
- The Space Infrastructure Fund,
- Geoscience Australia’s initiatives,
- Digital Earth Australia (DEA),
- National Positioning Infrastructure Capability (NPIC),
- Satellite‑Based Augmentation System (SBAS).
De plus, l’Etat fédéral aura pour mission de mettre à profit les contributions des acteurs australiens (du monde académique, des organisations de recherches, des industries, des territoires, etc.) afin d’optimiser leurs contributions.
Investissements :
- $73.2 millions alloués au développement du secteur spatial australien sont inscrits au budget 2019-2020.
- $47.7 millions attribués à l’agence spatiale australienne nouvellement créée,
- $19.5 millions alloués à la création d’un fonds national pour les infrastructures spatiales, le but étant de soutenir l’émergence d’une industrie spatiale australienne et de tripler sa valeur à $12 milliards d’ici 2030. Ce fond de $19.5 millions inclut entre autres :
- $2 millions pour le développement d’une capacité de production de rang mondial dans le domaine spatial en Nouvelle-Galles du Sud.
- $6 millions pour la création d’un centre de contrôle de mission en Australie du Sud. Il abritera une plateforme pour les PME ainsi que des laboratoires de recherche pour le suivi des microsatellites.
- $6 millions attribués au centre pour les découvertes spatiales (« Space Discovery Centre »)
- A cela s’ajoutent $15 millions pour la période 2020-2022 de la part du « International Space Investment (ISI) initiative ».
- Finalement, suite à la dernière annonce de l’association des Cooperative Research Centre, un CRC SmartSat sera créé à Adelaïde. Financé à hauteur de $55 millions de la part du gouvernement fédéral et $167 millions (incluant une part de contribution en nature) par les 74 participants au centre (universités, industries et agences gouvernementales). Ce centre sera dédié au développement des technologies de communication avancées et à l’observation de la Terre depuis l’espace.
5. Annexe
Source : Advancing Space Australian Civil Space Strategy 2019 – 2028