DiLaAg : un projet autrichien pour soutenir le développement de l’agriculture numérique

Partager
Autriche

Autriche | Agronomie et alimentation
6 juillet 2021

Comment l’agriculture numérique peut-elle servir le bien-être des animaux et des humains ? Et plus largement : comment donner un nouvel élan aux technologies agricoles ? Ce sont les questions auxquelles des chercheurs de l’Université des ressources naturelles et des sciences de la vie de Vienne (Boku), de l’Université technique de Vienne (TU Wien) et de l’Université vétérinaire de Vienne (VetMed Uni), en coopération avec le monde agricole, tentent de répondre avec le projet « DiLaAg - Digitisation and Innovation Lab in Agricultural Sciences ».

Une vache peut aujourd’hui être traite d’une manière entièrement automatique par un robot, si la ferme dans laquelle elle est élevée est dotée d’équipements technologiques modernes. Par ailleurs, dans certaines fermes où les animaux sont libres de se déplacer, une vache peut se rendre d’elle-même plusieurs fois par jour au robot de traite : cette méthode est plus conforme au comportement naturel des animaux que la pratique consistant à traire l’animal le matin et le soir. Cela semble donc présenter des avantages aussi bien pour les animaux que pour les agriculteurs. Pour l’agriculteur, le robot de traite représente non seulement un gain de temps mais également la possibilité d’une gestion sanitaire du troupeau basée sur des données : en effet, l’utilisation d’un robot permet de surveiller constamment le flux de lait mais aussi d’en contrôler la qualité afin de détecter de potentiels agents pathogènes. Les gestionnaires d’exploitations agricoles peuvent ainsi détecter les éventuels problèmes chez leurs animaux à un stade précoce et ainsi économiser sur l’administration d’antibiotiques.

Cependant, ce système a-t-il réellement pour objectif de servir le bien-être des animaux ou bien n’est-il qu’un moyen parmi d’autres d’augmenter les volumes de production et donc de gagner en productivité ? La réponse à cette question n’est pas évidente : elle dépend de la mise en œuvre spécifique du système. « La numérisation de l’agriculture ouvre des possibilités inimaginables. Elle peut être utilisée au bénéfice des animaux et de la nature, mais aussi à leur détriment » a déclaré Andreas Gronauer au Standard. Directeur de l’Institut d’ingénierie agricole de l’Université des ressources naturelles et des sciences de la vie de Vienne (Boku), M. Gronauer a supervisé plusieurs décennies de développement technologique dans le domaine de l’agriculture (il a par exemple suivi le développement du premier robot de traite à la fin des années 1980).

Dans le cadre de la numérisation du secteur agricole, les chercheurs sont confrontés à un défi : développer des solutions technologiques qui s’intègrent dans les pratiques agricoles réelles. Cela nécessite une coopération étroite entre la science et les agriculteurs eux-mêmes. C’est à cette collaboration que travaille le projet « DiLaAg - Digitisation and Innovation Lab in Agricultural Sciences », dirigé par M. Gronauer : la Boku, la TU Wien et la VetMed Uni sont impliquées dans le projet et coopèrent étroitement avec des entreprises partenaires, entre autres issues du monde agricole. DiLaAg, soutenu par le Land de Basse-Autriche, a été récemment présenté comme un projet de recherche de premier plan pour l’agriculture par le conseil consultatif pour l’agriculture et la sylviculture du Forum écosocial, ONG autrichienne dont l’objectif est la promotion d’une économie de marché écosociale. Par ailleurs, outre les fermes expérimentales de la Boku et de la VetMed Uni, deux fermes indépendantes participent également aux essais de nouvelles technologies.

L’un des éléments clés du projet est la formation de jeunes chercheurs par le biais d’un collège doctoral, qui a pour but de permettre aux étudiants d’approfondir leurs connaissances à l’intersection des sciences agricoles et de la numérisation. C’est par exemple dans le cadre d’un mémoire de Master que le robot Mathilda a été conçu et dont l’objectif est de développer divers processus de contrôle pour les cultures arables et l’horticulture. L’une de ses caractéristiques est qu’il permet d’effectuer des observations à distance, par exemple sur l’état de croissance des plantes : des algorithmes d’intelligence artificielle sont entre autres utilisés pour détecter les mauvaises herbes à un stade précoce de leur croissance. Le projet prévoit également la création d’une plateforme de recherche, de développement, de formation et de conseil intitulée « Digital Agriculture Lab ». Cette dernière sera ouverte au public et se veut un lieu de rencontre pour le discours social sur le sujet de la numérisation des pratiques agricoles.

En effet, l’une des questions importantes posées par le projet – et plus largement par la numérisation du secteur et des pratiques agricoles – est également l’accès aux informations et aux données générées dans ce secteur. « Au cours des deux dernières générations, on a assisté à une évolution qui a déconnecté l’agriculture des consommateurs. (…) On sait peu de choses sur l’origine exacte des aliments. Cet aspect social pourrait également être abordé avec les outils de la numérisation ». Ainsi, par l’intermédiaire de projets comme DiLaAg, les données recueillies sur la qualité du lait de vache, la croissance des plantes ou d’autres aspects concernant la transformation des aliments pourraient être mises à la disposition non seulement des agriculteurs mais aussi des consommateurs. Cela permettrait également de contrer les images négatives d’une agriculture industrialisée axée uniquement sur l’efficacité.

Sources :

Rédactrice : Kalina Esmein, kalina.esmein[at]diplomatie.gouv.fr - https://at.ambafrance.org/