La fourmi, un modèle de collaboration sociétale

Partager
Israël

Actualité
Israël | Science de la terre, de l’univers et de l’environnement : énergie, transports, espace, environnement
21 septembre 2018

Les fourmis peuvent ajuster leur activité de recherche de nourriture afin de s’adapter au besoin global de leur colonie, en ayant seulement recours à des interactions individuelles entre les butineuses et les autres fourmis du nid, selon de nouvelles découvertes publiées dans eLife.

Les fourmis fourragères ne constituent qu’environ 10% de toute une colonie. Elles collectent de la nourriture pour nourrir l’ensemble de la fourmilière, la collecte étant facilitée par un « estomac social » (un organe de récolte situé avant leur estomac principal) : la nourriture recueillie par une fourmi cueilleuse peut soit être transférée à l’estomac principal pour la digestion, soit régurgitée de l’estomac social et partagée avec d’autres fourmis à travers une sorte de bouche-à-bouche appelée trophallaxie.
Comment une toute petite proportion de population peut-elle évaluer les besoins nutritionnels de toute la colonie ? C’est cette question que se sont posé Dr. Ofer Feinerman et ses étudiants, le Dr. Efrat Greenwald et le doctorant Lior Baltiansky de l’Institut Weizmann.

En utilisant deux différentes méthodes, les scientifiques ont étudié comment l’objectif collectif de satiété des colonies est atteint par des individus qui n’ont pas forcément conscience de cet objectif. En utilisant l’imagerie par fluorescence, les chercheurs ont réussi à observer l’estomac de chaque fourmi butineuse et à quantifier le contenu des estomacs. Les fourmis ont été individuellement marquées à l’aide d’un système de codes-barres imprimés sur de minuscules étiquettes.
Pendant que les membres de la colonie mangeaient, les scientifiques ont observé le flux et le stockage de nourriture et ont identifié des « règles comportementales microscopiques » suivies par des butineuses.
Il s’avère que les fourmis butineuses distribuent la nourriture à un rythme qui dépend de la quantité déjà présente dans les estomacs des individus qu’elles rencontrent. La quantité de nourriture que les butineuses fournissent à une fourmilière semble d’abord assez aléatoire : le récepteur (la fourmi qui reçoit) n’est pas rempli à pleine capacité, mais le butineur ne lui donne pas toute la réserve de nourriture. Néanmoins, il existe un lien étroit entre la quantité de nourriture donnée à un compagnon de nid et la quantité déjà présente dans la réserve de ce receveur. Les fourmis réceptrices sont donc des indicateurs de la quantité de nourriture nécessaire à apporter. Le flux de nourriture n’est donc pas constant mais s’adapte continuellement à la demande globale de la colonie.
« La prochaine étape consistera à étudier les fondements de la régulation nutritionnelle collective par rapport à des défis nutritionnels plus complexes, tels que le choix entre différentes sources de nourriture dont la qualité ou la composition varie. Ils sont bien connus dans les colonies d’insectes sociaux », explique le co-premier auteur Lior Baltiansky. « En regardant plus largement au niveau du contrôle de la distribution des tâches ou des fournitures, dans lequel les mécanismes internes de certains des réseaux les plus communs ne sont pas bien compris, nous pouvons avoir des choses à apprendre des fourmis, qui représentent l’un des exemples naturels de fonctionnement distribué. »

Quelles informations bénéfiques, pour nous humains, l’étude des fournis et de leur modèle sociétal peut-elle nous apporter ? L’analyse de leur gestion des flux est un élément. En effet, l’un des nombreux défis actuels de notre société est la gestion des flux. Que ce soit dans la communication (ex : réseaux internet) ou dans le domaine de l’énergie (ex : réseaux électriques). Nous sommes dans une recherche constante d’optimisation, afin d’obtenir les meilleurs rendements aux moindres coûts.
Ainsi, rien d’étonnant à ce que ces chercheurs israéliens s’intéressent aux fourmis, car ces dernières sont des exemples d’organisation et de gestion des réseaux.

Source : https://wis-wander.weizmann.ac.il/space-physics/study-reveals-how-forager-ants-keep-their-colonies-well-fed

Rédacteur : Henri-Baptiste Marjault (henri.margault[a]mail.huji.ac.il), doctorant à l’Université hébraïque de Jérusalem